Exercices systémiques: l'utérus, le jumeau perdu et les femmes décédées en couche

Intégrer et remercier les anciens tourments pour accueillir l’émerveillement.

 

Cette troisième grossesse fut un long chemin, parsemé d’examens en tout genre comme de nombreuses échographies, dont l’une qui me fera saigner le lendemain tellement la personne s’acharnait sur mon ventre. Elle pressait l’appareil avec force à certains endroits car bébé n’était pas positionné à sa convenance pour pouvoir mesurer la distance qui se situait au niveau du cou, pour détecter une éventuelle anomalie.

Assaillie dans ma sphère intime, je sentais que mon bébé se protégeait et que j’étais impuissante par rapport à ce qui se déroulait. Heureusement, j’avais ce oui intérieur qui aide dans ce genre de situation. J’avais l’image simple des parents de ce médecin derrière lui, et tout se transforme très vite, comme par miracle. J’avais aussi placé derrière moi, l’énergie physique de mon père et de ma mère.

J’avais également appris lors d’une séance d’haptonomie à accueillir intentionnellement l’énergie de son bras et de son geste mécanique pour lui et tant intrusif pour moi et mon bébé, en posant le regard partant de sa main jusqu’à son épaule pour ressentir sa présence, l’accepter et lui donner la place à l’intérieur de ma propre énergie corporelle. Un exercice qui demande une vigilance extrême de présence et qui apaise quelque peu les gestes parfois brusques et machinaux des médecins échographistes, qui je le comprends bien, reçoivent consultation à la chaîne. L’énergie toute entière du moment présent s’allège, des bribes de présence s’installent et permettent un soulagement pour chacun. Nos parents respectifs derrière nous mettent en résonance nos coeurs.

 

Exercice systémique en lien avec l’utérus et la cicatrice. La découverte du jumeau perdu.

La première thématique a été celle de la cicatrice de mon utérus. Nous avons découvert durant la constellation que chacune de nos deux premières filles avaient perdu une jumelle, qui était partie tout au début de mes grossesses. Puis le bébé que je portais avait lui aussi perdu un frère jumeau.

Il existe des études qui montrent que dans la majorité des grossesses, un fœtus part en début de gestation pour laisser plus de place au bébé qui reste. C’est un geste intentionnel décidé par les deux fœtus, mais la douleur déchirante du départ soudain de l’autre, sera le plus souvent problématique pour celui qui reste. Il se sentira coupable d’être en vie alors que l’autre meurt. Celui qui reste aura des remords et sera malheureux.

Il existe un livre qui s’intitule « Le syndrome du jumeau perdu », de Alfred R. et Bettina Austermann. Un embryon sur dix environ a eu un jumeau qui souvent disparaît durant la grossesse. Pour des milliers de personnes, l’origine méconnue d’un profond sentiment de nostalgie, de mal-être ou de culpabilité.

Sa lecture aide à mieux comprendre certains comportements qui nous semblent familiers où que l’on observe chez nous-mêmes ou nos enfants.

« Pour les demi-jumeaux, le jumeau perdu est souvent l’être le plus important et le plus proche d’eux dans la vie. Ils ressentent inconsciemment qu’un frère jumeau ou une sœur jumelle ont existé à un moment donné. Ils le recherchent de manière confuse parce qu’ils n’ont pas compris ce qui s’est produit dans le passé. Ni leur propre enfant ni leur partenaire ne sont aussi proche que leur jumeau. L’attention intérieure du parent concerné se focalise sur son jumeau perdu bien qu’il ne sache rien de lui. Beaucoup d’énergie vitale liée à cette dynamique est activée par ce drame utérin. Le père ou la mère ne comprennent pas par eux-mêmes  pourquoi certaines choses sont tellement difficiles, comme par exemple le fait de ne pas avoir assez d’énergie, la raison de leur sentiment de culpabilité ou la cause de manque de confiance en leurs capacités. »

« L’enfant ressent aussi cette injustice ou encore ce manque sans comprendre ce que c’est. Il pense souvent que le problème vient de lui. Il ne se sent pas aimé. La relation avec ses parents est perturbée. Quelque chose ne va pas, mais personne ne sait de quoi il s’agit. »

En intégrant la présence des sœurs et frère de nos trois filles dans nos cœurs, dans nos bras, nous avons trouvé la force de transcender la tristesse de chacune de ces pertes pour s’enlacer tous et toutes comme si nous formions qu’un seul et unique vaste cocon chaud et douillet.

Et cela est rendu miraculeusement possible, par-delà le concept de « mort » que nous croyons lointaine et impalpable, qui nous effraie par des images erronées et circule un effet négatif dans nos cœurs.

Chaque fœtus créé est une énergie transmise dans l’Univers, et chaque fœtus décédé dans le ventre de la mère attendra d’être vu et accepté comme tel. Quand la mère en prend conscience, quand elle peut voir l’enfant et le toucher, lui caresser doucement la joue ou les cheveux, s’enclenche immédiatement en elle le processus de deuil.

Elle reconnaît soudainement et voit ce qui a été. Un espace se crée pour une nouvelle rencontre, pour un moment d’intimité partagé. Sentir physiquement sous ces doigts la peau de son enfant lui montre qu’il est bien réel, qu’il vit là sous son regard, buvant chaque échange visuel avec elle, lui souriant et s’apaisant à chaque caresse qu’il reçoit tendrement de sa part. La mère ressentira une énorme tristesse qu’elle laissera fondre et sortir d’elle. Puis avec cet enfant dans les bras, elle reviendra à cette chance qu’on lui offre, celle d’être un instant liée physiquement, visuellement, verbalement avec son enfant ainsi retrouvé. Elle réalisera que son enfant s’apaise et que souvent, il s’endort confortablement dans ses bras. Parfois il s’éloigne gentiment et se met en position fœtale, pour signifier qu’il a reçu tout ce dont il avait besoin pour reposer en paix. L’aurevoir arrive pour la mère qui doit traverser à nouveau cette épreuve de revenir de ce voyage délicat et intemporel. Elle prend avec elle son enfant qu’elle portera à jamais dans son cœur, avec des souvenirs de regards profonds et intenses.

Et dans nos réalités, ce deuil est souvent mis de côté, car quelques pertes de sang en début de grossesse n’inquiètent pas et cela est vu comme « normal ». Pourtant derrière ces écoulements de sang se dessine une autre perte, celui d’un enfant qui meurt dans le ventre de sa mère.

Je me souviens également d’avoir longuement regardé la personne qui représentait mon utérus, de l’avoir remercié pour son rôle effectué pour mes deux premières grossesses. Puis chaque enfant a été vu dans l’ordre de préséance, de la plus âgée à la plus jeune. Olivier et moi-même avec nos parents biologiques respectifs derrière nous, ainsi que nos ancêtres, avons pu voir nos enfants devant nous et sentir la Vie nous traverser jusqu’à eux. Choisir la Vie avec joie a été une phrase clé, récitée comme une mélodie harmonieuse jusqu’au jour de mon premier accouchement par voie basse.

 

Un autre exercice systémique : une action passée et un projet futur.

Un autre exercice systémique s’est offert à moi lors d’un séminaire avec Wolfgang Deusser, constellateur en Allemagne, dans le cadre de ma formation pour devenir constellatrice à l’école Hellinger. Il fallait choisir entre un événement passé et un événement futur, que deux personnes allaient représenter. J’ai choisi la césarienne et l’accouchement naturel.

Il a fallu donc que je me dirige pas à pas vers la personne qui désignait la césarienne qui était à quelques mètres devant moi, que j’établisse un lien avec elle par le regard, puis ressentir un mouvement s’emparer naturellement de moi, m’emportant et me poussant vers elle, jusqu’à pouvoir l’enlacer et intégrer sa présence profondément accueillante. La personne était bienveillante envers moi, énormément de force maternelle émanait d’elle. Elle semblait très grande, très vieille aussi, très sage. Je l’ai remerciée de toute mon âme et cœur.

Puis est venu pour moi le moment idéal de me séparer de son aura bienfaitrice. Ce geste anodin semble simple, pourtant il m’a fallu plusieurs minutes pour m’éloigner d’elle, pour sentir en moi son amplitude sans ressentir la tristesse de la quitter.

JPuis en me retournant de l’autre côté, j’aperçois « l’accouchement naturel » qui était représenté par un homme, très grand, très robuste, très viril et très jeune. Au fur et à mesure que je m’approchais de lui, une force incroyable me traversait. Marchant pas à pas vers lui, je sentais une énergie de confiance, de sécurité, de bonheur, de fierté. Puis toute proche, ses mains se sont posées sur mes épaules et me transmettaient un message clair à l’intérieur de moi qui disait :« oui, la voie est libre pour devenir une championne ». Je sentais que cela réveillait en moi cette double force, féminine et masculine, celle qui a donné naissance à tant d’êtres humains.

Dans un élan de gratitude, me voilà sortie de l’exercice avec un grand respect, celui envers chaque femme qui a porté, qui porte ou qui portera un jour ou l’autre le mystère entier de la Vie en elle.

 

Les femmes décédées en couche dans le système familial.

Durant le même séminaire, une ultime constellation a dévoilé que de nombreuses femmes dans mon système familial étaient mortes allongées sur le sol. J’étaismoi-même enceinte, au milieu d’une dizaine de corps, toutes pleurant leur bébé perdu. En leur disant : « je suis des vôtres, je suis comme vous, je vous vois, je sens votre douleur, je sens votre tristesse », j’étais en lien avec chacun d’elles. J’étais très troublée, je me sentais très proche de toutes ces femmes, sanglotant à chaudes larmes à terre, accablée par la tristesse, même mortes.

Le besoin de caresser doucement et lentement les mains de quelques-unes s’établit, puis d’un élan libérateur je me relève et fais un grand pas en arrière. Ce pas décisif sera très important, il me permettra de sortir de cette dynamique appartenant au passé. Il m’offrira le bonheur de renaître à mon état de mère et de donner la vie à travers la sagesse de mon propre corps de femme, avec dans mon cœur, toutes celles qui ont laissé leur vie en donnant la Vie.


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